Le président de la Conférence des évêques de France (CEF) a appelé mercredi à "ne pas traiter les migrants comme des délinquants", au lendemain de l'adoption par le Parlement d'une loi controversée sur l'immigration.
"L'État a le droit, le devoir peut-être, d'organiser la migration, de la réguler", a déclaré Mgr Eric de Moulins-Beaufort lors d'un entretien avec l'AFP à Rome, en marge d'une visite d'une délégation de la CEF.
"Mais il faut que les personnes, même en situation dite 'irrégulière', ne soient pas traitées comme des délinquants parce que beaucoup (de ceux) qui viennent ne sont pas des voleurs ni des assassins", a-t-il ajouté.
Interrogé sur l'adoption de ce texte qui durcit nettement les conditions d'accueil des étrangers en France, Mgr de Moulins-Beaufort a insisté sur la nécessité "d'accueillir et d'organiser de manière digne ces migrations".
"Dans les discussions qu'on a pu entendre, on n'est pas toujours dans le respect des personnes. On sent une espèce de sentiment de peur", a déploré l'archevêque de Reims.
"Notre rôle est de rappeler inlassablement qu'une personne en migration est un être humain qui n'a pas à être dépouillé de tous ses droits, mais au contraire qui doit être respecté dans son humanité et accompagné le mieux possible."
"Cela vaut pour l'Europe aussi", a précisé le président de la CEF alors que, hasard du calendrier, les 27 Etats membres de l'Union européenne ont trouvé mercredi un accord sur la réforme du système migratoire européen, vivement critiqué par les défenseurs des droits humains.
Début décembre, les évêques de France avaient dit leur "inquiétude" sur la possibilité d'une suppression de l'aide médicale d'Etat (AME) destinée aux étrangers sans-papiers, finalement conservée avec la promesse d'une réforme début 2024.
Lors de sa visite à Marseille en septembre, le pape François avait lancé un vibrant appel pour l'accueil des migrants devant le président Emmanuel Macron et le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, qui a porté ce projet de loi.
Emmenée par Mgr de Moulins-Beaufort, la délégation de la présidence de la CEF a été reçue par le pape lundi au Vatican ainsi que plusieurs responsables de dicastères (ministères) de la Curie, le gouvernement central du Saint-Siège.
Durant leur audience lundi, le pape leur a réservé un "accueil chaleureux" et évoqué, entre autres, la lutte contre les violences sexuelles dans l'Eglise, ont déclaré à l'AFP le père Hugues de Woillemont, secrétaire général de la CEF, et Mgr Vincent Jordy, vice-président.
"Nous sommes revenus sur la mise en œuvre de nos mesures, notamment le tribunal pénal canonique national (TPCN). (Le pape) a dit qu'il y avait un vrai sujet et que nous l'avions pris en charge, ce qui nous conforte dans notre labeur", a déclaré Mgr de Moulins-Beaufort.
La Rédaction (avec AFP)